Point de départ :
Si vous préfériez avant, vous pouvez retourner à vos occupations. Sinon, laissez-moi vous raconter…
Liste du matériel
Outillage :
- Scies (égoïne a minima, circulaire, à onglet…)
- Marteaux
- Équerre, réglet, mètre
- Serre-joints
- Maillet
- Ciseaux à bois
- Perceuse ou chignole
- Clé à cliquet, plate ou à pipe
- Si besoin de couder les pentures : étau
- Outil pour fixer les gonds au mur : perforateur par exemple
- Fil à plomb ou niveau laser
- Niveau à bulle
- Selon poids des portes et configuration : étais de maçon
- Selon état initial des planches et la finition souhaitée :
- Ponceuse et/ou meuleuse avec support pour disque abrasif
- Rabot
- Et probablement quelques autres outils que j’ai oubliés…
Matériaux et quincaillerie :
- Planches
- Poutrelles
- Clous et vis
- Pentures
- Gonds
- Boulons TRCC
- Selon type de fixation des gonds : chevilles, cartouche pour scellement chimique, etc.
- Serrure, poignée
- Verrou baïonnette ou équivalent
Modélisation 3D
Cliquez sur l’image ci-dessous pour la regarder sous toutes les coutures :
La recherche des matériaux
Un peu d’archéologie dans les caves et les granges a fourni tout le bois qu’il fallait :
Délignage, nettoyage et ponçage
Commencent alors les opérations de délignage. Nous avons pris le parti de limiter les pertes : après délignage, les deux bords longs ne seront pas toujours parallèles.
Un peu de nettoyage…
Tout est propre, on peut attaquer les choses sérieuses sans se salir les mains. A commencer par le ponçage, à la meuleuse (grain 80) car les planches sont bien marquées par la scie circulaire qui a servi à leur découpe. Après ponçage, ces marques restent légèrement visibles, mais on a un petit faible pour ce genre d’imperfections.
Ossature
Étape suivante : l’ossature, en double Z, avec embrèvements aux jonctions. Quelques petites règles à respecter :
… et bien sûr, les Z dans le bon sens : sur notre image ci-dessus, les gonds seront à gauche.
Nos poutrelles font environ 60*90 mm, mais la section peut être différente pourvu qu’elle soit suffisante.
On installe un cadre qui servira de support à notre ossature. On s’assure que les deux « solives » soient parallèles et que leur face supérieure soit sur le même plan. On met en place en superposant les écharpes sur les traverses afin de prendre des repères pour tracer les embrèvements. On trace puis taille les embrèvements. Embrèvement fini. Ce n’est pas parfait, les poutrelles légèrement vrillées ne nous facilitent pas la tâche, mais c’est suffisant pour assurer la résistance de l’ensemble. Résultat. Résultat.
Lames
On « décalque » la courbe de l’arche…
Les planches ne sont pas toutes de la même longueur, donc on cherche la meilleure combinaison pour couvrir au mieux la surface de la porte :
Première approximation On ajoute le panneau sur lequel se trouve les tracés au bon endroit pour positionner les planches
On crée des chanfreins au rabot pour faire joli…
Il est temps de positionner précisément les planches sur l’ossature, et de les clouer (pointes tête plate de 80 mm).
La planche côté serrure doit dépasser de quelques centimètres… … pour que l’ossature ne gêne pas l’ouverture On maintient en position Jeu de dilation de ~2 mm entre les planches Clouage en quinconce, et jamais centré sur la traverse pour ne pas gêner les futures vis de penture Protection des planches contre les coups de marteau maladroits On n’enfonce pas tout à fait jusqu’au bout… … on termine avec une sorte de chasse-clou fait-maison Protection main intégrée !
Des pentures… coudées !
Il est temps de préparer les pentures coudées (voir modèle 3D en haut de page). Dans notre cas, ces pentures coudées permettent de positionner la porte en retrait dans l’ouverture tout en autorisant une ouverture vers l’extérieur. Sans coude, le haut de la porte buterait dans l’arche.
A l’origine, de simples pentures droites 1000 mm L’occasion de tester notre étau tout neuf. On repère le positionnement pour produire 6 pentures identiques. On fixe une pièce bien rigide sur la penture, au-dessus de l’étau, pour s’assurer un coude franc et au bon endroit. Oh… … hisse ! Répéter six fois au total.
Lames, suite et fin
Retour à notre bois…
Gonds
Et maintenant, l’étape la plus délicate : sceller les gonds dans les pierres. Nous avons de belles et grosses pierres d’angle, nous avons donc fait le choix du scellement chimique. En cas de plus petites pierres, il est possible de les sceller dans les joints avec du Ciment Naturel Prompt.
Nous devons donc sceller 3 gonds de chaque côté. Un seul critère de réussite : pour un côté donné, les tiges des trois gonds doivent être alignées sur un seul et même axe vertical. Cerise sur le gâteau : le scellement chimique est définitif, et fait sa prise en quelques dizaines de secondes (varie selon la température).
Une technique souvent employée est de mettre en place la porte avec ses pentures, puis de sceller les gonds un à un en fonction de la position des pentures. Ceci n’est possible que si la tige de chaque gond est amovible. Sinon, une variante est de mettre en place la porte sans les pentures, puis de mettre en place penture et gond en même temps (scotchés ensemble, par exemple).
A notre sens, ces techniques présentent plusieurs inconvénients :
- Si les axes des pentures (fixées sur la porte) ne sont pas parfaitement alignés et verticaux, cette erreur d’alignement se répercutera sur les gonds scellés dans le mur.
- Même avec des pentures parfaitement positionnées, le jeu qui existe entre une penture et son gond ne garantit pas que les tiges des gonds seront correctement alignées.
Or, pour une porte qui s’ouvre et se ferme sans créer de contraintes sur le bois ni le mur, le plus important est que le critère de réussite énoncé ci-dessus soit respecté le mieux possible. C’est pourquoi nous avons choisi de sceller les gonds indépendamment de la porte, en alignant du mieux possible les trois tiges sur un axe vertical. Mode d’emploi :
(Note : sur les photos, les portes sont déjà positionnées lors du scellement, mais ce n’est pas requis)
A l’aide d’un gabarit de précision, on détermine la position du premier trou. On trace la position des 3 trous en les alignant verticalement (fil à plomb ou laser) Pour percer un trou parfaitement horizontal, nous nous aidons d’un laser… … positionné à la bonne hauteur grâce à un support réglable micrométriquement ! On perce au perforateur avec une longue mèche, sur laquelle se projette le laser. Les trois gonds sont maintenus sur une règle de maçon, puis scellés simultanément. Voilà ! L’alignement semble correct
Sueurs froides garanties ! La prochaine fois, nous mettrons le tube de scellement chimique au frigo pour ralentir la prise.
Mise en place et réglages
Les portes sont lourdes, de l’ordre d’une centaine de kilogrammes. Afin de positionner les portes, nous avons ajouté temporairement deux « jambes » par porte, à l’aide d’étais de maçon. Ainsi, il est facile de déplacer la porte horizontalement (coup de maillet en pied d’étais) et verticalement (ajustement de la longueur des étais).
Vue d’ensemble Sur la traverse supérieure… … les étais sont vissés Sur la traverse inférieure, les étais sont guidés mais peuvent coulisser librement. Positionnement de la porte au sol avant de la redresser En place ! Une barre tient la porte debout… … … avec réglage possible. On ajoute des sangles pour sécuriser le tout. Pour entrer et sortir, on peut se faufiler sous la porte… si comme moi, vos planches sont trop courtes ! Sinon, un treuil permet d’entrouvrir une porte tel un pont levis. Mise à niveau…
Pentures
Une fois les deux battants en place à leur position définitive, il ne reste qu’à faire la jonction avec les gonds. J’ai nommé : les pentures !
Du fait du déport créé par le coude, il est important que les pentures soient fixées à la porte au plus près du mur. Pour cela, nous perçons un trou supplémentaire sur la penture. Il sera situé en partie basse pour réduire les effort sur la vis (et donc sur le bois et la penture) car le couple induit par le déport tend à « décoller » le bas de la penture de la porte.
Le poids de la porte aura tendance à écarter le haut de la porte du mur, et à l’inverse, à pousser le bas de la porte vers le mur. Les pentures n’étant pas parfaitement rigides, il est possible de contrer ce phénomène par deux actions :
- Lors de la fixation des pentures, on veillera à tirer sur la penture supérieure pour l’écarter au maximum du gond. A l’inverse, on poussera au maximum la penture inférieure en direction du gond. Concernant la penture centrale, on laissera en position neutre.
- Il est aussi possible d’incliner légèrement la porte vers le mur en abaissant de quelques millimètres l’étais côté gonds.
Pour la fixation des pentures, on emploie des boulons TRCC : Tête Ronde Collet Carré. Prenez garde à acheter le diamètre adapté à vos pentures – M7 dans notre cas.
On met en place la penture… … et on repère l’emplacement du trou additionnel. On le reporte sur l’autre face Un coup de poinçon avec de percer Résultat On installe les vis TRCC et on donne quelques coups de marteau pour que le collet carré s’enfonce dans le trou. Penture bien plaquée contre la porte, et de niveau On marque à travers la penture Une croix (pour vérification ultérieure) et perçage Chaque trou débouche côté verso…. On perce un emplacement… … pour accueillir écrou et rondelle… … car nos vis ne dépassent pas. On serre fermement. Voilà ! Pour le moment… … 2 ou 3 vis suffisent. Vérification du niveau Validé. On ajoute la vis additionnelle en perçant à travers la penture. Il est temps de mettre les autres vis.
Bas de porte
Dans notre cas, le bas de porte à deux rôles :
- Masquer les différences de longueur entre planches.
- Protéger le bas des lames verticales, qui est la partie qui souffre le plus des intempéries et autres maltraitances. Bonne nouvelle : le bas de porte présente l’avantage d’être facilement remplaçable
Battement
Pour couvrir l’espace central, on ajoute une barre à battement. Elle est généralement placé côté extérieur, mais pour des raisons esthétiques, nous avons choisi de la placer côté intérieur.
Seuil de porte
Il manquait un seuil de porte pour compléter l’ensemble.
Serrurerie
Que serait une porte sans sa serrurerie ?
Je vous passe les détails sur ce système récupéré sur une fenêtre ancienne… Et pour le bas, un verrou baïonnette… … avec une petite cale Une serrure en applique qui n’est pas prévue pour s’ouvrir vers l’intérieur Mais avec quelques coups de tournevis… … et un coup de perceuse… … le pêne demi-tour se retrouve dans le bon sens Une cale pour adapter l’épaisseur … et le tour est joué ! Et une jolie poignée ancienne pour finir le tout
Photographies bonus
Remerciements
Pour leur aide et leurs conseils : Timothée, Denis, Mélodie, Bernard, Nadia, et les membres du groupe Rénovation Pertinente qui ont répondu à mes questions.
14 commentaires sur “Porte de grange en chêne”
Superbe travail Clément, Bravo !
Pour ceux qui rêvent de tôle, effectivement, ne restez pas ici, vous y perdrez du temps.
Par contre, tous les autres, amoureux du travail bien fait, du respect des bâtis anciens, prenez le temps de bien regarder et lire ce que Clément nous a présenté, vous y gagnerez … du temps et, plus encore, du bonheur
Merci beaucoup Claude !
WAouh! Super travail! Et belle présentation. J’aimerais également créer mon site internet de partage de mon autoconstruction bois paille terre et j’aurais aimé savoir comment tu fais pour créer du texte interactif sur photo et éventuellement je suis preneur si tu as d’autres conseils pour la création et présentation de mon site internet. Bien à toi, Jean
Merci !
Je vais t’envoyer un mail…
Merci pour cette belle série de photos avec explication. Maintenant, j’ose aussi commencer à faire une porte pour ma grange (plus simple – sans l’arche, mais plus grand…. )
Merci, et bon courage !
Bonjour, les portes métaliques ont elles été enlevées? C’est dommage avec d’aussi belles portes en chene et qui ferment.
Bonjour, oui les anciennes portes métalliques ont été enlevées depuis ! Effectivement, c’est plus joli ainsi. Il faut que je prenne de nouvelles photos… Merci !
Bonjour,
Merci pour ce formidable partage et votre sens du détail admirable dans la pédagogie des petites choses. La qualité de votre rendu nous donne envie de nous inspirer de vos travaux pour réaliser les portes d’une écurie aux dimensions similaires. Nous n’avons qu’une interrogation : quelle est l’épaisseur de vos planches de chêne ? Nous jugeons environ 2,5 à 3 cm, est-ce le cas ? Car cela semble déterminant dans le poids et l’équilibre de la porte à venir (en châtaigner de notre côté).
Merci par avance et encore bravo,
Thibault
Bien à vous
Bonjour Thibault,
Merci pour les compliments, et oui, vous avez vu juste : les planches font ~25-27 mm. Mais je pense que 20-22 mm suffirait, selon la taille de la porte.
Bon courage pour votre projet ! Le châtaignier c’est très bien aussi.
Merci pour ton amour du travail bien fait.
Cela fait grand plaisir de découvrir ton article superbement illustré avec vos photos !
Je vais tenter (et réussir…) une porte de grange qui ne fera que 1.60m de large en tout, et les côtés seront en chevrons bois aussi ce qui facilitera la tâche de visser les gonds au lieu de devoir les sceller dans la pierre !
Encore merci pour cette présentation de votre travail à deux.
Merci, et bon courage ! Effectivement, j’ai aussi fait une porte plus petite avec un cadre fixe en bois sur le mur, et c’est nettement plus confortable à la pose.
Très bonne explication avec les photos . Nous restons dans le bâti ancien
Je voudrais savoir suivant l’essence du bois ( projection en planches de châtaignier ) y a-t-il un même résultat
Le châtaignier est proche du chêne, aussi bien concernant la résistance (cf. fichiers Tropix) que l’esthétique, donc ça ne devrait pas poser de problèmes.